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Ô Roman Flügel, toi grand manitou

Difficile de passer outre Roman Flügel, si vous voyez dans les machines, une source de création et non de domination. L’homme aux mille sobriquets traîne avec lui 20 ans de chamboulement culturel électronique et n’y est pas pour rien dans cette lumineuse histoire. On s’est délectés de sa dernière pièce d’electronica ludique « Happiness is Happening ». Petit cours de natation en eaux tempérées.

Roman Flügel aka o70, aka List, aka Acid Test, aka Eight Miles High nous est revenu en septembre avec « Happiness is Happening », deuxième opus sous son nom civil. Cet avant-gardiste de Francfort basé chez Dial (dit le label dit de la house classieuse, avec Pantha Du Prince, Efdemin, John Roberts, Lawrence) depuis son EP à sensation « Fatty Folders » a déjà presque 20 ans de carrière derrière lui. Dans ce nouvel album, il manifeste de nouveau son talent de grand manitou qui manie tous les paramètres électroniques avec aisance et exigence millimétrée.

Le premier titre Connecting the ghost suggère que l’écoute soit cérébrale. Sensation erronée provoquée par l’apparition d’un panel de sonorités à l’existence insoupçonnée. Entrée en matière où la basse rebondit comme un spectre sautant de câble en câble. L’écho résonne, se multiplie et une transe d’electronica et d’ambient émerge, mesurée et assumée. La mélodie qui grésille en arrière-plan se détache et deux temporalités différentes se déploient ouvrant la voie au reste de l’œuvre. On dit bien œuvre puisque l’écoute de « Happiness is Happening » évoque un grand tout dont chaque partie est nécessaire. Rien que ça ! La dance music se présente, s’incline et se meut au ralenti pour que l’on ne puisse rater aucune de ses gestes (Wilkie). Une transe s’insinue dans nos oreilles, en mouvement constant, se présentant à chaque fois sous un nouveau jour.

Il est difficile de fixer l’origine du son : percussions électroniques, nappes numériques, sons sidérurgiques filtrés et retaillées. Roman Flügel se révèle être un Varèse de l’electronica. Tout devient matière à créer – de l’industriel aux nappes vintages des vieux jeux-vidéos. Le plus troublant dans cette histoire est la conciliation de l’éclectisme et de la cohérence. Alors que dans Parades, Flügel exhibe une esthétique frénétique évoquant un new-âge psychédélique, il n’hésite pas à la piste suivante à dessiner une ambient planante où un nocturne de Debussy s’hybride en house acidulée (We have a nice life).

Roman Flügel, sorcier un peu fou, sort de son alambic une masterpiece d’un équilibre parfait. Il visite des coins inexplorés du continent électronique et la progression courbée fait successivement planer, vibrer, danser, puis apaise l’auditeur. Quelques moments d’accalmie ponctue l’opus au milieu d’une texture musicale presque palpable. Entraînant et minimaliste, complexe dans la forme et épurée à l’écoute, « Happiness is Happening » porte noblement son nom. Un disque à garder dans sa cave à vinyle pour la génération suivante.

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