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Hellfest : « C’est cool de pouvoir accueillir des familles »

Cette année, le Hellfest vit sa dixième édition. Pour l’occasion nous sommes allés voir Alexxx Rebecq, chargé de com du plus grand festival hard rock de France. Dans cette première partie d’interview (on publiera la suite début de semaine prochaine), on a parlé de programmation, de fan-club, de galères et de Disneyland.

L’ancêtre du Hellfest s’appelait le Furyfest. Comment l’idée était née ?

C’était l’idée de Benjamin Barbaud [le boss du festival / NdlR], un grand fan de punk et de hardcore. Il ne comprenait pas pourquoi les groupes qu’il aimait ne passaient pas près de chez lui, alors il a commencé à organiser de petits concerts et de fil en aiguille, il en est venu à organiser le Furyfest. Ça a très vite explosé.

L’aventure s’est terminée par une grosse galère…

Quand Benjamin a commencé, il était très jeune et ne connaissait pas forcément bien le music business. Il a eu l’opportunité de voir le festival racheté par des promoteurs étrangers. Ils ont imposé des changements de directives, de partenaires, de prestataires. Un mois avant le festival, tout le monde s’est barré. Il a fallu remonter une équipe en urgence, retrouver un régisseur, un directeur technique. Le festival a pu se tenir, mais au moment de payer les prestataires, Ben s’est rendu compte que les propriétaires du Furyfest s’étaient tirés avec la caisse sans payer personne. Les salariés du festival n’étaient pas déclarés, mais n’en savaient rien. Suite à ça, Benjamin a décidé de ne pas abandonner et de remonter un nouveau festival, chez lui, à Clisson. C’est le Hellfest. Ça a été des années un peu difficiles. En 2007, on a eu beaucoup de problèmes, de la boue partout, les festivaliers s’étaient beaucoup plaints et Korn avait annulé au dernier moment. C’était les années noires du festival.

Et en 2012, c’est l’explosion ?

C’est l’année du changement de site, à cause de la construction d’un lycée. Face à cette contrainte, nous avons décidé de passer de trois à six scènes et d’ouvrir le festival à un plus large public. C’était un pari. On a enrichi la programmation avec des groupes comme Deep purple, ZZ Top, Iggy pop, qui parlent davantage au grand public. C’était risqué car les festivaliers habituels auraient pu ne pas vouloir partager « leur » festival. Au contraire, la caste métal a accueilli ce nouveau public à bras ouverts. Et c’est cool de pouvoir accueillir des familles. Des gens qui vont au Puy du Fou ou au Futuroscope viennent maintenant aussi au Hellfest pour écouter de la musique, même sans connaître les groupes, mais pour découvrir cet environnement et la scénographie. Un peu comme quand ils vont à Eurodisney.

‘On n’est pas un festival Lambda, on est au Hellfest’

Justement, Hellfest comparé à un Disneyland pour adultes, c’est péjoratif ?

On l’a entendu dire dans les deux sens. Quand on a installé la grande roue, on s’est fait cracher dessus. Certains festivaliers ne comprenaient pas que le prix du billet serve à payer une grande roue alors qu’ils venaient voir des concerts. Nous, on trouvait que c’était intéressant. Au final, tout le monde a voulu faire un tour de grande roue pour prendre un selfie d’en haut. Ça a été un succès colossal. Le Hell City Square, une reproduction de Camden street à Londres, c’est un peu comme le village à Eurodisney. Alors oui, certains préfèrent le festival les pieds dans la gadoue, les conditions Woodstock à l’ancienne, mais nous on pense que quand tu viens sur un festival, c’est important d’avoir de bonnes conditions d’accueil et d’en prendre plein les yeux. C’est d’ailleurs pour ça qu’on ne vend pas d’espace annonceurs bien qu’on reçoive des propositions très intéressantes. C’est un énorme manque à gagner, mais nous refusons pour permettre au public une immersion totale. On n’est pas un festival Lambda, on est au Hellfest. La plupart des festivals ont un parking avec les frites à gauche, les tee-shirts à droite et les scènes en face. Nous, on a plein de zones où on se balade de village en village. Quand on compare à Disneyland, c’est cool, parce que moi j’aime bien aller à Disneyland, même si j’ai 35 ans, parce qu’il y a un côté féérique. Même le fan le plus « die hard » ne peut pas rester de marbre devant le Hellfest la nuit face aux projections et à la scénographie. Ce n’est pas donné à tous les festivals d’être comparés à Disneyland, surtout pour un festival de métal.

Le Braveheart pendant Dagoba, l’an passé. Vous ne verrez pas ça à Disneyland, par contre. 

On évoquait tout à l’heure l’annulation de Korn à la dernière minute en 2007. Est-ce qu’avec le succès du festival, ces galères diminuent ?

Des comportements de divas, il y en a toujours. Ce qu’on faisait en 2007 n’a rien à voir avec ce qu’on fait en 2015. Depuis, on a accueilli Kiss, Iron Maiden, Aerosmith. A part Metallica ou AC/DC qui pourraient nous faire peur, on peut accueillir tout le monde. Il y a toujours des artistes qui font des leurs. Il y a en a un qui peut faire chier pour une bouteille de vin, s’il n’a pas le millésime qu’il a demandé ou bien parce qu’il ne fait pas assez chaud ou pas assez froid dans sa loge. Ça, on arrive toujours à gérer, mais dans tout ce brouhaha, tu te dis « merde, il faut que je pense à changer la bouteille de machin, les verres de bidule. » L’annulation de Korn c’est autre chose. Elle s’est faite pour des raisons techniques, auxquelles nous avions pourtant répondues. C’était une année un peu tragique. Il pleuvait, il a fallu modifier la scène pour des questions de sécurité. Tout était conforme, mais Korn a prétendu que non. Mais ils n’avaient pas envie de jouer, tout simplement. Bon, ils ont quand même attendu d’avoir le virement pour partir.

Depuis, le rapport de force avec les groupes a un peu changé ?

Maintenant, on essaie de se protéger de ce genre de choses. Quand on a accueilli les Guns and Roses en 2012, ils ont joué avec trois minutes de retard seulement alors qu’Axl Rose est réputé pour ne jamais jouer à l’heure. C’était du jamais vu depuis cinq ans ! La réputation du festival nous donne des arguments pour dire aux groupes qu’on va savoir les accueillir. On a les couilles pour pouvoir dire « ça va se passer comme ça » et trouver un commun accord pour que tout se passe bien. Même si les têtes d’affiche ont tendance à être chez elles quand elles viennent chez toi. Quand Korn est revenu, ils appréhendaient beaucoup, mais ils donné un show dantesque et ça s’est bien passé.

Korn – Live Hellfest 2013, de retour après leur plantade

Metallica et AC/DC, c’est un rêve de les faire venir ?

Nous avons toujours travaillé avec ces objectifs. On voulait avoir Iron Maiden, c’était un cap à franchir. AC/DC, on s’est penché dessus, mais c’est trop gros en terme de logistique et trop cher. En revanche, je pense que Metallica au Hellfest, ça se fera un jour. Après Iron Maiden, c’est ça la prochaine étape pour donner encore plus de rayonnement au festival.

Hellfest, c’est aussi une vraie une communauté de fans, que vous animez avec un club, le Hellfest kult…

Il y a deux ans, je me suis rendu compte que beaucoup de festivaliers achètent leur place sans même connaître la programmation. Ceux-là nous font une confiance aveugle et veulent venir quoiqu’il arrive. À côté de ça, au sein de la production, nous avons une grande famille de bénévoles et de partenaires qu’on appelle le Hellfest Crew, une grosse bande de copains. Ça m’a donné l’idée de réunir des fans sous la bannière du Hellfest. Une sorte de fan-club comme on disait dans les années 90. On a une identité forte qui nous permet de le faire. Certains festivaliers viennent depuis des années et ne connaissent pas leur voisin qui vient lui aussi. Alors Hellfest kult permet de faire vivre le festival toute l’année. Des réunions sont organisées régulièrement. Le week-end dernier, j’étais encore à l’une d’elles. Nous étions une centaine. Tout le monde porte la veste du club. À force, les gens deviennent copains, font du covoiturage ou se voient tout au long de l’année. La communauté grandit : elle compte maintenant 1 500 membres partout en France et dans le monde. Nous sommes le seul festival à l’avoir fait, mais ça ne m’étonnerait pas qu’un jour un autre festival se mette à le faire également.

Crédit Photo : Nicko Guihal

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